Dans le
Nosferatu de Murnau, le rêve et le réel,
limaginaire et le merveilleux sinterpénètrent
librement, mais cest le personnage de Nosferatu
lui-même qui crée le fantastique. Cet
être composite, fait de la juxtaposition de
deux "natures" dun côté
le comte Orlok et de lautre le vampire ,
relève dune esthétique à
lextrême du grotesque. Nosferatu a une
tête de gargouille, une silhouette filiforme
dont la maigreur frileuse est accentuée par
les habits qui lemprisonnent et dont la teinte
uniformément sombre contraste avec la blancheur
de la peau et la brillance des yeux encastrés
au fond dorbites cerclées de noir. Sa
démarche se caractérise par la raideur
du corps, la lenteur des pas, le caractère
inexorable de la progression. Nosferatu, héritier
direct de lexpressionnisme, procède dune
symbolique de lagressivité. Il dépasse
demblée le cadre de la figuration insolite
ou de la fiction effrayante. Son aspect diabolique,
avec ses longues oreilles pointues et ses griffes
qui témoignent de son appartenance à
un bestiaire démoniaque, ses gestes imprévisibles,
tantôt étrangement souples, tantôt
saccadés, voire frénétiques,
expliquent lémotion que crée chacune
de ses apparitions. À tel point que, dans une
séquence restée célèbre,
celle où il avance lentement sur le pont du
bateau fantôme, lange de la caméra
lui confère, outre des proportions gigantesques,
une sorte dobliquité qui le projette
hors de lécran et en fait comme une menace
tangible, à trois dimensions.
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